
Valentin RINEAU

Sorbonne Université - Tour 46-56 (5e étage)
4 place Jussieu
75005 Paris
France
Ma recherche se divise en deux parties fortement liées l’une à l’autre. Une partie est théorique, et vise, en systématique, à étudier les théories et les méthodes pour reconstruire des arbres retraçant l’histoire évolutionnaire des espèces. L’autre partie de ma recherche, paléontologique, est centrée sur un groupe fossile, les rudistes, que j’étudie des points de vue taxonomique, paléoécologique, systématique et biogéographique.
En systématique phylogénétique, le caractère et l’homologie sont des entités théoriques fondamentales. Si l’homologie est une hypothèse sur les relations de parenté entre des parties d’organismes, c’est sur le caractère que se fonde toute reconstruction d’une histoire évolutionnaire. Plus exactement, ce sont les états de caractères qui vont permettre de mettre en évidence des groupes monophylétiques. Ainsi, le partage d’état de caractère dérivés (synapomorphies) permet-il de reconnaître ces groupes. La conception la plus courante du caractère phylogénétique est qu’il soutient une structure qui va être optimisée suivant un modèle d’arbres réticulés. On choisit ensuite l’arbre qui est le plus en adéquation avec les caractères ainsi générés. En systématique, dans toutes les méthodes, l’arrière-plan théorique de la source des informations phylogénétiques est l’homologie transformationnelle. L’idée est que l’homologie (et le caractère) se transforme, et que c’est par cette transformation que l’on peut obtenir des informations sur la phylogénie que l’on souhaite reconstruire. En 1981, Nelson et Platnick posent les bases d’une refondation de l’homologie et du caractère. Les parties d’organismes ne se transforment pas en d’autres, elles se différencient, elles se modifient tout en restant les mêmes. L’idée du changement s’en retrouve bouleversée. Une seule méthode de reconstruction phylogénétique fonctionne sur ce principe : il s’agit de l’analyse à trois éléments. Dans cette méthode, les caractères sont codés sous forme d’arbres, qui, mis en congruence, permettent de retrouver un arbre phylogénétique optimal. La partie théorique de ma recherche est centrée sur l’analyse à trois éléments. J’étudie en particulier l’utilisation de l’analyse à trois éléments pour mieux étudier les résultats d’une analyse, et comprendre comment sont produits les arbres phylogénétiques à partir d’un ensemble de caractères. Je travaille également sur les arbres, leur décomposition de manière plus générale par méthodes de consensus et de super-arbres. Enfin, cette partie de ma recherche s’appuie sur le logiciel Agatta que je développe actuellement (https://github.com/vrineau/Agatta)
Je travaille a développer ces aspects théoriques en prenant appui sur des études empiriques. Je cherche également à montrer que l’analyse à trois éléments est une méthode pertinente pour reconstruire l’histoire de nombreux types d’entités évoluant au cours du temps, tels les espèces biologiques, mais également les aires biogéographiques, les langues, ou encore de nombreux produits culturels humains. Actuellement, je travaille sur l’analyse d’objets lithiques du Marine Isotope Stage 11.
Je m’intéresse également à l’histoire des sciences en systématique, ce qui m’a amené à participer à la traduction de l’ouvrage séminal de Nelson et Plantick, disponible gratuitement en ligne (https://sfs.infosyslab.fr/index.php/systematics-and-biogeography/).
La biodiversité telle que nous la connaissons aujourd’hui est l’une des plus grandes extinctions de l’histoire de la vie. Les déclencheurs de crises sont connus grâce à des études sur la biodiversité passée : des concentrations exceptionnelles de CO2, des fluctuations importantes du niveau de la mer ou une augmentation drastique de la température sont les principaux paramètres contrôlant les crises biologiques à l’échelle globale. Les rudistes bivalves (ordre Hippuritida) sont d’excellents indicateurs pour étudier ces changements drastiques, car ils sont particulièrement diversifiés avec une répartition mondiale, et sont également sensibles aux paramètres environnementaux. Leur forte abondance en fait les principaux producteurs de carbonate de calcium biologique de leur temps et conditionne l’étendue de leur milieu de vie, induisant un contrôle rétroactif sur leur biodiversité qui en font un acteur majeur des équilibres atmosphériques planétaires. L’histoire des rudistes est ponctuée de plusieurs épisodes de crises biologiques et de diversifications. Leur dynamique de biodiversité peut être liée à l’adaptation aux nouveaux modes de vie dans les eaux peu profondes et est principalement influencée par les épisodes de crise associés aux événements anoxiques océaniques. Ma recherche à pour but d’un point de vue taxonomique de poursuivre l’effort de description de nouvelles espèces de rudistes dans le monde. Des travaux récents ont démontré que les analyses morphométriques et statistiques sont des outils précieux pour établir des comptes rendus précis et objectifs de la biodiversité des rudistes. Une réévaluation en profondeur de la délimitation des espèces est toujours en attente pour de nombreuses espèces clés de l’évolution. Plusieurs auteurs ont montré que la biodiversité de certains groupes est clairement surestimée, ce qui peut conduire à de nombreux biais dans les méta-analyses utilisant ces données. Je travaille également à prendre en compte la variabilité intra-spécifique des rudistes pour mieux comprendre les délimitations d’espèces.
Du point de vue phylogénétique, je travaille à redéfinir les homologies de manière adéquate afin de produire les analyses phylogénétiques les plus précises possibles, afin de refonder la taxonomie supra-spécifique des rudistes aujourd’hui inadéquate. In fine, ces phylogénies seront mises en perspectives afin de mieux comprendre la distribution paléobiogéographique et la dynamique de la diversification des rudistes. Enfin, concernant la paléoécologie, je m’intéresse à l’étude de l’établissement des communautés à rudistes dans leur paléoenvironnement en prenant en compte des aspects de paléontologie quantitatives, des analyses spatiales, ainsi que de sédimentologie. Depuis deux ans, je m’intéresse particulièrement à l’histoire des premiers rudistes au Jurassique et au lien entre leur développement, celui des récifs coralliens, et le climat.
Affleurement fossilifère à nombreux rudistes Epidiceratidae de Valfin lès Saint Claude (Jura), daté du Kimméridgien.
J’enseigne à Sorbonne Université dans différentes unités d’enseignements ayant trait à la géologie et à la systématique. Je suis en particulier responsable des UE Informatique pour les Géosciences (2ST041), Fondamentaux en biodiversité, écologie, évolution (5BEB79), et Formalisation des connaissances en systématique et paléodiversité (4BEB01). Je me suis fortement investi dans la refondation de l’enseignement d’informatique en licence en favorisant des approches de pédagogie active et d’enseignement hybride. J’interviens également dans plusieurs UE ayant trait à l’enseignement de la géologie et de la paléontologie de niveau licence : Paléontologie (2ST032), Paléontologie & Évolution (3ST066), Écologie et évolution (LU2SV301), stage de terrain de L2 en Normandie (2ST303). Pour l’enseignement de la systématique phylogénétique, j’interviens dans les UE de niveau Master en Systématique, Evolution, Paléontologie (https://sep.infosyslab.fr/) Méthodologie pour Biodiversité, Écologie, Évolution (4BEB02), Archives paléontologiques (4BEB24), (Paléo)Biogéographie et (Paléo)Biodiversité (5BEB55).
Je suis membre du bureau de la Société française de systématique (https://sfs.snv.jussieu.fr/). Au sein de la société, je suis actuellement responsable du projet e-systematica dont le but est de mettre en place une encyclopédie en ligne rédigée par des chercheurs sur les principaux concepts de la systématique (https://e-systematica.org).