Soutenance de thèse Marjorie Roscian

La soutenance aura lieu le 10 décembre, à partir de 14h, dans l'amphithéâtre Rouelle, Pavillon de la Baleine au Muséum national d'Histoire naturelle.
Composition du jury :
Resumé :
Dans le monde vivant, il n'est pas rare d'observer des adaptations des mâchoires aux différents régimes alimentaires. Chez les céphalopodes, la mâchoire, appelée bec, se compose de deux parties chitineuses dont la forme est propre à chaque espèce. Les particularités de forme et de composition en font de très bons indicateurs d'interactions dans les réseaux trophiques. Ces becs sont également utilisés pour les analyses de contaminants, les déterminations de taille et d'âge des individus etc. La masse buccale des céphalopodes est constituée d'une jointure particulière puisqu'elle est entièrement musculaire et ne possède pas d'articulation solide. Néanmoins, cette articulation et son fonctionnement sont aujourd'hui encore très peu étudiés. Pourtant, l'identification de paramètres écologiques en lien avec le régime alimentaire et la compréhension des capacités de morsure des différentes espèces permettraient de répondre à un problème récurrent chez ce groupe : identifier leurs proies. Dans ce contexte, le premier objectif de cette thèse est de caractériser la morphologie des mâchoires de céphalopodes en 3D et de déterminer s'il existe un lien entre la forme des becs et certains paramètres écologiques comme le régime alimentaire à travers une analyse de morphométrie géométrique 3D. Le second objectif est d'approfondir la connaissance de la musculature de la mâchoire, d'estimer des forces de morsures théoriques pour les différents groupes et d'identifier des fonctions liant muscles et formes de becs. Enfin, le troisième objectif de cette thèse est de tester s'il est possible d'exploiter les résultats obtenus sur les formes actuelles pour interpréter les becs fossiles.
Soixante-quinze espèces de céphalopodes coléoides ont été imagées en 3D à l'aide de photogrammétrie subaquatique et de tomographie à rayons X. Les analyses morphométriques révèlent que les morphologies portent un signal phylogénétique modéré. Les becs inférieurs montrent également un lien avec l'habitat (pélagique, benthique, démersal) et le niveau trophique alors que les paramètres testés ne sont pas en lien avec les formes des becs supérieurs. La variabilité de ces derniers est concentrée sur leur rostre et permet dans un premier temps de valider deux fonctions de morsure : hacher ou transpercer. L'étude de l'anatomie musculaire révèle des différences de musculatures significatives entre Octopodiformes et Decapodiformes ainsi que des différences de forces de morsure en lien avec la forme des becs. Les octopodes benthiques ont une force de morsure plus grande que les seiches ou certains calmars. Il existe néanmoins une grande gamme de variation de force chez les calmars, en lien avec la grande diversité de formes de becs et de régimes alimentaires. Finalement, un fragment fossile de mâchoire de céphalopode a été étudié et les analyses ont montré que ce fragment possède une morphologie comparable aux actuels et il a pu être identifié comme un bec supérieur d'octopodiforme pélagique, ouvrant la voie à d'autres analyses incluant des fossiles pour transférer les fonctions identifiées chez les actuels.